Notre santé et notre bien-être, tant physique qu’émotionnel, sont intimement liés à l’environnement dans lequel nous vivons. Nous traversons actuellement une période charnière qui nous amène à nous interroger sur notre place, en tant qu’êtres humains, au sein des écosystèmes ainsi que sur la nécessité de réintégrer le vivant dans nos lieux et habitudes de vie. Le design et l’architecture nous offrent cette possibilité de repenser la façon dont nous aménageons et occupons l’espace, en le reconnectant au monde naturel.
« Pour bien fonctionner, notre cerveau et notre corps ont besoin d’être en contact avec les éléments, que ce soit la lumière du jour, l’air frais ou l’eau », explique Loïc Angot, directeur de discipline – Stratégies durables chez Lemay et pilier de l’approche NET POSITIFMC. Reprenant l’idée des prescriptions vertes du Dr François Reeves, un cardiologue d’intervention et professeur agrégé de médecine qui étudie la corrélation entre environnement et santé cardiaque, il ajoute : « Les architectes et les urbanistes peuvent faire office de “docteurs” pour la ville, en proposant aux communautés des espaces qui améliorent leur qualité de vie. »
Au même titre que les professionnels de la santé qui posent des diagnostics et soignent les personnes, les concepteurs sont capables d’apporter aux métropoles des solutions bienfaisantes et régénératrices. En assumant une responsabilité sociale, ils peuvent transformer positivement l’espace urbain – des rues aux quartiers en passant par le paysage et les milieux de vie – par des conceptions durables, axées sur l’humain, l’inclusion, la mobilité active et la participation citoyenne.
Des bâtiments sains pour des personnes en santé
À l’heure où les changements climatiques intensifient les risques pour notre santé et en créent de nouveaux, il est plus important que jamais d’agir sur notre cadre de vie, et cela passe par une conception éco-active des bâtiments, des paysages et de l’environnement urbain dans lesquels nous nous épanouissons. Matériaux biosourcés, ventilation naturelle, enveloppes actives et systèmes passifs qui limitent le recours à des dispositifs mécaniques couteux et à fort impact environnemental… Les solutions bioclimatiques sont nombreuses et avantageuses, tant pour la santé des occupants et usagers que les écosystèmes environnants.
Réintégrer le vivant dans nos environnements bâtis est également une stratégie clé pour rendre notre monde plus sain. Cela implique de restaurer le lien avec la nature et de soutenir une biodiversité plus riche. De même, la création d’espaces où l’on se sent bien, associée aux bienfaits biophiliques de l’éclairage naturel, des plantes et des matériaux durables comme le bois, favorise l’engagement, la bonne humeur et une meilleure concentration, en plus d’améliorer la qualité de l’air.
Au-delà des matériaux écologiques ou de l’accès à la végétation, à la lumière naturelle directe et à l’horizon, nous pouvons aussi considérer la façon dont l’espace est agencé et interconnecté pour stimuler l’activité physique et les interactions sociales. C’est ce que nous avons fait dans des lieux de travail comme le siège social de Nortera et le Phénix, où l’emplacement et la conception des escaliers encouragent le mouvement et les échanges. L’architecture salutogénique est une autre démarche intéressante : elle cherche à stimuler l’esprit et à susciter le plaisir, la créativité et la satisfaction à travers des espaces qui favorisent la socialisation, la relaxation, la collaboration et même l’utilisation de moyens de transport durables.
« Dans nos efforts d’efficacité, nos bâtiments ont parfois perdu cette capacité à nous faire sentir mieux que quand nous y sommes entrés », souligne Antoine Buisseret, directeur de conception chez Lemay et responsable de l’approche Design+Soins.
« Et si l’on partait du principe que l’architecture peut stimuler la fonction à laquelle un espace est destiné tout en procurant aux usagers un plus grand sentiment de bien-être? On retrouverait ainsi une véritable connexion entre les éléments, le corps et l’esprit. Cette approche peut autant s’appliquer aux environnements de soins qu’aux lieux de travail, d’apprentissage ou d’habitation… Sans oublier les lieux “non fonctionnels” mais pourtant indispensables où nous pouvons nous abandonner, rêver, réfléchir, nous ouvrir à d’autres dimensions et à d’autres modes de vie. »
Cela dit, les concepts qui profitent à notre santé et à notre bien-être ne se limitent pas à l’intérieur. Il est aussi possible d’aménager l’espace de manière à ce qu’il ait des effets bénéfiques sur l’extérieur, en tenant compte de son impact sur la communauté. Les équipements publics, comme ceux qui servent de lieux de rassemblement lors d’événements, doivent être pensés dans leur ensemble, tant au niveau de leur usage que de leur empreinte dans la ville. À quoi ressembleront-ils lorsqu’ils ne seront pas occupés? Quelle sera leur signification dans l’espace urbain? En plus d’éviter le gaspillage de ressources, cette réflexion permet de les rendre plus actifs et mieux adaptés, et d’en faire des vecteurs d’intensité urbaine pour la population et la ville.
Le centre de transport Bellechasse est une parfaite illustration de cette approche régénérative. Conçue avec les citoyens en tête, la configuration multiétage dissimule les flottes d’autobus électriques et hybrides sous terre afin de réduire la pollution sonore et visuelle. En surface, différents espaces végétalisés ont été aménagés pour s’intégrer harmonieusement au paysage environnant, réduire l’impact environnemental du bâtiment et les îlots de chaleur, enrichir la biodiversité et encourager les parcours piétonniers. En mettant l’accent sur la dimension citoyenne, cette proposition architecturale valorise et redessine complètement le contexte urbain, offrant aux citoyens la possibilité de se réapproprier les lieux et d’avoir un nouveau point de repère où se retrouver et se détendre.
« Cette conception mutuellement bénéfique pour l’humain et l’environnement a des répercussions positives sur notre santé et notre capacité de récupération, mais aussi sur notre vie sociale, notre apprentissage, notre façon de travailler, etc. », indique Antoine Buisseret.
Quand le bâti devient soignant
Bien que la réflexion sur la place accordée à la santé et au bien-être dans la conception gagne à s’étendre à l’ensemble du cadre bâti, elle trouve son fondement d’abord et avant tout dans les environnements de soins. Destinés à nous guérir et à nous remettre sur pied, ces lieux sont un excellent exemple du rôle que peut jouer l’architecture dans le mieux-être, l’inclusion et l’intégration des vulnérabilités. Si leur conception ne leur permet pas de nous soutenir autant que de nous guérir, alors elle contrevient à leur vocation première.
Comme tant d’autres structures, les environnements de soins de santé se sont progressivement industrialisés pour devenir des « machines à soigner ». Aujourd’hui, ils sont appelés à évoluer vers une forme positive mieux intégrée aux environnements urbains, et qui soit bénéfique autant pour le bien-être des patients que pour celui de leur personnel soignant. Des projets comme le Centre intégré de cancérologie du CHU de Québec, avec sa conception articulée autour d’un grand jardin central, montrent comment les soins de santé peuvent être ancrés dans des espaces qui vont au-delà du contexte médical. Toits végétalisés, œuvres d’art à l’intérieur et à l’extérieur, ouverture à la nature et à la lumière du jour, disposition plus ergonomique… Tous ces éléments participent à repenser la prise en soins et à créer un environnement guérissant, apaisant et rassurant qui place le patient au cœur des préoccupations.
La concrétisation de cette démarche nécessite toutefois une nouvelle approche de la conception qui interroge notre façon de répondre aux besoins actuels et futurs du secteur. En intégrant les patients, scientifiques et professionnels de la santé dans un processus de conception transdisciplinaire orientée vers l’avenir, nous permettons aux bâtiments de soutenir l’amélioration des expériences qui y sont vécues.« Les spécialistes de la santé souhaitent que ces changements soient mis en œuvre, mais ils doivent être catalysés par les concepteurs et faire partie de notre planification, affirme Loïc Angot. Nous devons revoir nos méthodes pour montrer toutes les possibilités qu’offrent les solutions alternatives. Les investissements ne doivent pas se limiter aux coûts immédiats. »
Pour une architecture active, plutôt que réactive
Nous avons vu à quel point l’architecture et le design peuvent être utiles pour relever toutes sortes de défis, qu’il s’agisse d’enjeux associés aux changements climatiques ou de préoccupations quotidiennes liées aux modes de vie sédentaires. Même s’ils ne sont pas un remède universel, ils s’avèrent un outil puissant au service de notre bien-être et de la planète.
Pour y parvenir, nous devons changer notre approche de la conception en réintégrant activement le vivant au bâti et en recherchant des solutions qui enrichissent véritablement et durablement nos territoires et modes de vie.
Nous mettons en relation l’expertise des concepteurs et des partenaires de la santé à travers un dialogue exploratoire sur la manière dont l’architecture peut être un vecteur d’innovation dans les environnements de soins. Découvrez Design+SoinsMD, notre approche centrée sur l’humain.